Monsieur le Président,

Nous vous écrivons de toute urgence au sujet des discussions sur un quatorzième paquet de sanctions économiques contre la Russie, sa guerre en Ukraine, et le rôle que jouent les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) russe pour soutenir l’économie de l’agresseur et remplir son trésor de guerre. Nous, citoyens inquiets, militants et acteurs pour la sécurité mondiale et la justice environnementale, demandons instamment à la France de jouer un rôle de premier plan en plaidant pourune interdiction totale des importations de GNL russe dans le cadre du quatorzième paquet de sanctions à venir contre laRussie. Celle-ci doit s’appliquer aux importations ainsi qu’aux opérations de transbordement comme celles ayant lieu au terminal de Montoir-de-Bretagne.

Nous saluons les efforts récents de plusieurs pays européens, dont l’Allemagne, l’Italie et d’autres, pour soutenir l’impositionde sanctions complètes et transparentes sur le GNL russe.

Cependant, il est nécessaire d’aller plus loin, et la France a un rôle crucial à jouer dans la conduite de ces efforts.

La récente escalade de la guerre en Ukraine deux ans après l’invasion massive de la Russie a mis en évidence la nécessité de rompre les liens économiques qui soutiennent l’agression russe. Les importations de GNL russe sont une source importante de revenus pour le gouvernement russe, ce qui lui permet de financer sa guerre et d’en intensifier la brutalité. Les attaques russes contre l’Ukraine ont causé des dommages considérables aux infrastructures vitales, notamment aux infrastructures énergétiques, dont 50 % ont été détruites. Les civils ukrainiens qui s’efforcent de survivre en seront d’autant plus menacésl’hiver prochain.

Des données récentes du Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur (CREA) mettent en évidence la croissance rapide desimportations de GNL russe de la France, avec des paiements totalisant 600 millions d’euros pour les seuls trois premiers mois de 2024. La France est devenue le consommateur de GNL russe qui connaît la croissance la plus rapide dans l’Union européenne, dépassant tous les autres pays au cours de cette période. Elle est en tête des importations de GNL russe en2024, tant en termes de croissance que de volume, avec un total de 1,5 million de tonnes. Cette situation intenable souligne lanécessité de prendre des mesures immédiates pour réduire la dépendance aux ressources énergétiques russes.

La France sape toute tentative d’aide à l’Ukraine en maintenant sa coopération avec la Russie et en lui versant des paiements pour le GNL. En cessant les importations russes et refusant de financer la Russie, la France contribuerait de manièresignificative à la capacité de l’Ukraine à se défendre contre l’agression russe. En outre, le maintien du soutien financier à la Russie ne prolonge pas seulement la guerre, mais pose également des risques économiques et sécuritaires à long terme pour l’Europe.

Il convient de noter qu’en 2023, les principaux consommateurs de gaz, notamment l’Allemagne, la Pologne et la République tchèque, ont réussi à réduire leur dépendance à l’égard du gazoduc russe et du gaz russe en général, créant ainsi un précédent pour l’indépendance énergétique de l’Europe.

Le Parlement européen a approuvé des règles permettant des interdictions nationales sur les importations de GNL russe, mais n’a pas abordé la question des transbordements. Nous demandons à la France de s’appuyer sur ce cadre réglementaire pour plaider en faveur de mesures globales portant à la fois sur les importations directes et sur les opérations de transbordement. Il s’agit notamment de préconiser des mécanismes d’application plus stricts et des sanctions pour les acteurs impliqués dans le contournement des interdictions d’importation par le biais de transbordements.

Si les pays de l’Union européenne n’interdisent pas les importations de GNL en provenance de Russie, les entreprises continueront à acheter de plus en plus de GNL russe. De janvier à fin avril 2024, l’UE a augmenté ses importations de GNL russe de 18 % en volume par rapport à la même période de quatre mois l’année précédente.

En tant que membre éminent de l’Union européenne et acteur clé des marchés mondiaux de l’énergie, la France a uneoccasion unique d’avoir un impact significatif pour favoriser la paix en Ukraine. Nous demandons instamment à la France de cesser de financer la guerre et de soutenir une interdiction complète du GNL russe couvrant les importations et les opérationsde transbordement. Cette mesure décisive enverrait un message fort au gouvernement russe : son agression ne sera pas tolérée. Elle démontrerait l’engagement de la France à respecter les normes et les valeurs internationales.

C’est pourquoi nous appelons la France à

1. Déclarer un soutien total à l’interdiction des importations de GNL russe dans le cadre du 14e paquet de sanctions contre la Russie, y compris des mesures visant à interdire le transbordement et l’importation par l’intermédiaire de pays tiers.

2. Collaborer avec les partenaires européens pour élaborer des stratégies visant à réduire la dépendance à l’égard des ressources énergétiques russes, y compris des investissements dans les énergies renouvelables et des mesures d’efficacité énergétique.

3. Veiller, dans les décisions politiques futures, à ce que les liens économiques qui soutiennent la Russie cessent et à ce qu’aucune ressource ne soutienne par inadvertance les actions hostiles de la Russie.

Nous vous remercions de votre engagement à respecter les normes et les valeurs internationales.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos sentiments distingués, Signataires :

• Razom We Stand
• B4Ukraine
• Stand with Ukraine France
• Les Amis de la Terre France 
• Greenpeace France
• Bond Beter Leefmilieu: Leef
• WECF (Women Engage for a Common Future) France et WECF International
• Urgewald
• Globalwitness
• International Partnership for Human Rights (IPHR)
• Réseau Action Climat